Avocat TEG erroné : analyse de l’opportunité d’une action en déchéance des intérêts du prêt

La jurisprudence relative à l’action en déchéance des intérêts d’un prêt contracté en cas de TEG erroné est foisonnante. Nombreuses sont les décisions ayant prononcé la déchéance des intérêts du prêt en cas d’erreur involontaire ou volontaire du banquier quant au calcul du taux effectif global.

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Exemple d’arrêt récent ayant débouté le demandeur de sa demande en déchéance de prêt :

 

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 30 Septembre 2020

Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A N° RG 18/03324 – N° Portalis DBVW-V-B7C-G2JU

Décision déférée à la Cour : 25 Juin 2018 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG

APPELANT :

Monsieur Aa A

… … … … … … …

… …

Représenté par Me Katja MAKOWSK], avocat à la Cour

INTIMEE :

SA BANQUE CIC EST venant aux droits du CREDIT INDUSTRIEL D’ALSACE ET DE LORRAINE

prise en la personne de son représentant légal

31 rue Jean Wenger Valentin

67958 STRASBOURG CEDEX 9

Représentée par Me Laurence FRICK, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 8 de l’ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 modifiée par ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 et de l’ordonnance en date du 31 mars 2020 de la Première Présidente de la Cour d’Appel de Colmar, l’affaire fixée à l’audience du 17 juin 2020 a été mise en délibéré, sans débats, les parties ne s’y étant pas opposées.

Mme PANETTA, Présidente de chambre, a été chargée du rapport dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

M. FREY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier : Mme B

ARRET :

– Contradictoire

– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

– signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIFS :

Le 23 juillet 2007, M. A a souscrit un prêt CIC IMMO PRET MODULABLE pour un total de 293 430 euros auprès de la banque CIC EST venant aux droits du CREDIT INSDUSTRIEL D’ALSACE ET DE LORRAINE (‘CIAL’ ci-après), en vue de l’acquisition de sa résidence principale située à Strasbourg, dont 100 000 euros d’apport personnel.

Le 27 septembre 2007, ledit contrat a été réitéré devant Maître Marc SERFATY, Notaire à ALBESTROFF.

Le prêt CIC IMMO PRET MODULABLE présente les caractéristiques suivantes : un taux fixe de 4,25% l’an, un remboursement de 360 mensualités d’un montant de 1 528,59 euros avec assurance, la première échéance versée le 5 octobre 2007 et la dernière le 5 février 2027, une hypothèque immobilière conventionnelle sur l’appartement objet du prêt, une assurance décès-invalidité permanente et totale ainsi qu’une incapacité de travail auprès des Assurances du Crédit Mutuel, un TEG de 4,5825 %.

Le 1er juin 2013, M. A a demandé à la société ARMORIA CONSULTING d’analyser le TEG mentionné sur l’offre de prêt. Cette dernière a dressé un rapport mentionnant un TEG de 5,50%.

Par acte du 10 juin 2013, M. A a fait assigner la banque CIC EST venant aux droits du CIAL devant le Tribunal de grande instance de Strasbourg.

Par un jugement rendu le 25 juin 2018, le Tribunal de grande instance de Strasbourg a déclaré irrecevables comme prescrites les actions en déchéance de la banque CIC EST de son droit aux intérêts et en nullité de la stipulation des intérêts dans l’acte notarié, débouté la banque CIC EST de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, condamné M. A aux entiers frais et dépens, condamné M. A à payer à la banque CIC EST une indemnité de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il a retenu que M. A aurait eu connaissance des prétendues erreurs dans le TEG grâce à un rapport d’expertise du 1er juin 2013, que M. A a attendu 6 ans pour faire réaliser cette expertise alors que l’offre de prêt comportait le détail du coût du prêt, que M. A aurait pu se rendre compte dès le 10 décembre 2007 des prétendus erreurs, qu’à cette date il a été destinataire du décompte détaillé du notaire, qu’une simple lecture sans calcul aurait permis de constater la non prise en compte de certains frais, que le délai de prescription doit commencer à courir dès cette date, que l’action était prescrite au 10 décembre 2012 soit antérieurement à la date d’assignation du 10 juin 2013.

Sur la demande reconventionnelle de la banque CIC EST de condamner M. A au paiement de dommages et intérêts pour atteinte à l’image de marque, troubles de gestion et frais entraînés, il a retenu que la banque CIC EST n’a pas prouvé la commission d’une faute par M. A, qu’elle n’a pas non plus prouver que M. A a agi dans le but de nuire à la banque, qu’il est présumé de bonne foi, et qu’il a pu se méprendre sur l’existence de ses droits.

  1. A a interjeté appel par déclaration faite au greffe le 24 juillet 2018.Le CIC EST venant aux droits du CIAL s’est constitué intimé le 1er août 2018.Par des dernières conclusions du 18 octobre 2018, auxquelles était joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif, qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, M. A demande à la Cour, de lui donner acte de ce qu’il produit en annexe à la présente un bordereau de communication de pièces, l’infirmation du jugement entrepris, la recevabilité de l’action en déchéance du droit aux intérêts de la banque CIC EST, la recevabilité de l’action en nullité des intérêts dans l’acte notarié, à titre principal la déchéance du droit aux intérêts de la banque CIC EST venant aux droits du CIAL, la condamnation de la banque CIC EST venant aux droits du CIAL à rembourser tous les intérêts perçus depuis le 5 octobre 2007 soit la somme de 102 588 euros, à titre subsidiaire le caractère erroné du TEG, la nullité de la stipulation des intérêts dans l’acte notarié, la soumission du prêt au taux d’intérêt légal, la condamnation de la banque CIC EST venant aux droits du CIAL au remboursement des sommes trop perçues au titre des intérêts depuis le 5 octobre 2007 jusqu’au 5 mars 2017, et la condamnation de la banque CIC EST venant aux droits du CIAL au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les frais et dépens.

    Au soutien de ses prétentions, sur l’absence de prescription, il soutient qu’il a agi contre la banque CIC EST sur deux fondements distincts : la déchéance du droit aux intérêts en raison du TEG erroné et la nullité de la stipulation des intérêts dans l’acte notarié.

    Sur l’action en déchéance du droit aux intérêts en raison du TEG erroné : Il prétend que la prescription de cette action n’a pas été soulevée par la banque CIC EST, que le juge ne peut pas suppléer d’office le moyen résultant de la prescription, que l’action était encadrée dans un délai de dix ans avant la réforme du 17 juin 2008, que l’action concernée ici n’est enfermée dans aucun délai spécifique et relève du délai prévu à l’article L110-4 du code de commerce, que le délai débute à compter de la date à laquelle le crédit est définitivement formé, que le tribunal a retenu la date du 10 décembre 2007, que les dispositions de la loi du 17 juin 2008 réduisant le délai de prescription ne s’appliquent aux prescriptions qu’à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi sans que la durée totale n’excède la durée prévue par la loi antérieure, qu’en 2008 il bénéficiait donc encore d’un délai de cinq ans soit jusqu’au 17 juin 2013, qu’il a assigné la banque le 10 juin 2013, et qu’en conséquence son action n’est pas prescrite.

    Sur l’action en nullité de la stipulation des intérêts conventionnels dans l’acte notarié : M. A estime que le point de départ du délai de prescription ne saurait être le jour où il a réceptionné le décompte détaillé, que la jurisprudence distingue entre le professionnel et le particulier, que la prescription ne court pas contre les emprunteurs particuliers tant qu’ils n’ont pas découvert le caractère erroné du taux, qu’il lui était impossible d’identifier l’erreur de calcul lors de la signature du contrat, que c’est uniquement grâce au rapport de l’analyste financier du 1er juin 2013, qu’il a pu en prendre connaissance, que le délai de prescription commence à courir à cette date, et que son action est donc recevable.

    Sur la déchéance du droit aux intérêts en raison d’un TEG erroné dans l’offre de prêt, M. A affirme que l’offre de prêt doit respecter les dispositions de l’ancien article L312-8 du code de la consommation, que le TEG représente le coût véritable du prêt pour le consommateur donc doit figurer dans l’offre de prêt, que l’ancien article L313-1 du code de la consommation précise les éléments composant le TEG, que tous les frais nécessaires à l’obtention du crédit n’ont pas été intégrés dans le calcul du TEG litigieux, que le TEG est fixé à 4,582% dans l’offre de prêt, que ce dernier ne prend pas en compte les frais de notaire qu’il a supportés, que la banque CIC EST a une obligation positive de rechercher tous les coûts, que la banque a retenu 1 530 euros de frais de notaire alors que le montant était de 24 150 euros, que ce montant figurait dans la demande de prêt, que les frais de notaire ont baissé à 18 311,94 euros car le bien a été vendu à 332 500 euros et non 350 000 euros, que les frais de garantie doivent également être intégrés dans le calcul du TEG, que les frais d’agence immobilière n’ont pas été pris en compte alors que le TEG aurait du en prendre compte, qu’il existe une différence de 0,92% entre le TEG réel et le TEG retenu par la banque CIC EST, et que la sanction pour un TEG non conforme est la déchéance du droit aux intérêts selon l’article L312-33 alinéa 4 du code de la consommation.

    Sur la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels dans l’acte notarié, il fait valoir que l’offre de prêt contient un TEG ne mentionnant pas les frais de garantie et de notaire, que selon l’ancien article L313-1 alinéa 2 du code de la consommation si les frais n’étaient pas déterminables lors de l’émission de l’offre de prêt alors ils doivent être indiqués impérativement lors de la signature de l’acte notarié, que la méconnaissance de l’article entraîne la nullité relative de la clause de stipulation des intérêts conventionnels en application de l’article 1304 du code civil.

    Par des dernières conclusions du 14 janvier 2019, auxquelles était joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif, qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, la banque CIC EST venant aux droits de la CIAL demande le rejet de l’appel, le débouté de M. A, la confirmation du jugement entrepris, la condamnation de M. A à payer à la banque CIC EST une indemnité de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les frais et dépens d’appel.

    Au soutien de ses prétentions, sur la prescription de l’action en déchéance du droit aux intérêts, elle estime que la prescription de cette action n’a pas été soulevée en premier ressort.

    Sur la prescription de l’action en nullité, elle prétend que cette action a toujours été enfermée dans un délai de prescription de cinq ans, que le point de départ de cette prescription commence à courir à compter du moment où les faits permettent de constater l’erreur, que l’erreur pouvait être vérifiée par l’emprunteur dès la réception du décompte de Me SERFATY donc dès 2007, qu’il n’était pas nécessaire de faire de calcul ou de vérifications complexes, que la prescription est donc acquise.

    Sur le fond, elle affirme que la différence entre le montant de l’opération immobilière et le prix net de l’appartement correspond aux frais de notaire, d’agence et autres, que certains frais n’ont pas à être intégrés dans le coût du prêt car ils sont liés à la vente, que la différence entre le montant de l’opération immobilière et le montant du crédit correspond à la part d’autofinancement par l’emprunteur, que le TEG doit contenir l’intégralité des coûts incombant à l’emprunteur et non les coûts de la vente ou de l’opération financée, que la partie adverse fait un amalgame entre les coûts de la vente et les coûts du prêt, que le contrat de vente existe indépendamment du prêt, et que sa conclusion entraîne des coûts qui lui sont propres.

    Subsidiairement sur la sanction réclamée, elle pense que seule la déchéance du droit aux intérêts est envisageable, qu’il s’agit de la seule sanction possible pour non-respect de l’article L312-33 du code de la consommation, qu’une erreur ne donne pas lieu à sanction automatique, qu’une erreur à la virgule près est minime et ne saurait causer un vice du consentement.

    La Cour se référera aux dernières écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, et des prétentions des parties.

    L’ordonnance de clôture a été rendue le 29 avril 2019.

    L’affaire a été appelée à l’audience du 17 juin 2020, qui s’est tenu sans audience, les parties ne s’y étant pas opposées.

MOTIFS DE LA DECISION :

I/ Sur la recevabilité des actions de M. A :

M. A exerce deux actions distinctes, qui ont été déclarées irrecevables comme prescrites par le jugement entrepris. Il convient d’envisager la recevabilité de chacune distinctement.

A/ Sur la recevabilité de l’action en déchéance des intérêts :

M. A souligne en premier lieu que la prescription de cette action n’avait pas été soulevée par la partie adverse, et que le juge n’a pas la faculté de soulever d’office un moyen tiré de la prescription. Surtout, il avance que son action n’est pas prescrite, car elle relevait, avant la réforme introduite par la loi du 17 juin 2008, du délai général prévu par l’article L. 110-4 du Code de commerce, à l’époque de dix ans. Il rappelle que la loi du 17 juin 2008 a prévu que les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s’appliquent aux prescriptions à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. Il en déduit qu’un délai de cinq ans a commencé à courir le 17 juin, la durée totale ‘ le délai courant depuis la conclusion du prêt le 10 décembre 2007 ‘ n’excédant pas 10 années. Il prétend donc, en ayant assigné la banque le 10 juin 2013, avoir agi dans le délai de cinq ans à compter du 17 juin 2008.

La société CIC Est ne s’oppose pas à ce moyen et rappelle qu’elle n’a pas soulevé la prescription de cette action en première instance.

Il convient de retenir, ainsi que l’expose l’appelant, que son action a été engagée dans le délai de cinq ans commençant à courir à la date du 17 juin 2008, délai prévu par la loi du même jour, sans que la durée totale du délai de prescription ait excédé celle prévue par la loi antérieure. Dès lors, son action, exercée le 10 juin 2013, n’est pas prescrite. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

B/ Sur la recevabilité de l’action en nullité de la stipulation d’intérêts conventionnels :

Il n’est pas contesté que le délai de prescription applicable est de cinq ans en la matière. Le débat porte sur la détermination du point de départ du délai de prescription. Il résulte des dispositions légales, ainsi qu’interprétées par la Cour de Cassation, que, tant dans le cas de l’action en nullité de la stipulation d’intérêts, que dans celui de l’action en déchéance du droit aux intérêts, la date à laquelle commence à courir le délai de prescription est celle à laquelle l’emprunteur a connu ou aurait dû connaître l’erreur affectant le TEG, cette date étant appréciée souverainement par le juge du fond.

Il revient à M. A, emprunteur et demandeur, d’apporter la preuve de la date à laquelle il a eu connaissance de l’erreur affectant selon lui le TEG.

M. A allègue qu’il n’a eu connaissance de l’erreur affectant le TEG que le 1er juin 2013, date à laquelle il a réceptionné les conclusions de l’analyste financier ayant examiné le contrat de prêt. Il en déduit que c’est à cette date, à laquelle il a pris conscience de l’erreur, que la prescription a commencé à courir. Il en conclut que sa demande, introduite par assignation en date du 10 juin 2013, n’est pas prescrite.

Pour sa part, la société CIC Est considère au contraire que M. A avait, dès la date de signature de l’offre de prêt, tous les éléments en sa possession pour apprécier l’exactitude du TEG. Elle rappelle que la jurisprudence de la Cour de cassation, concernant des prêts accordés à des consommateurs, retient que le point de départ de la prescription est la date de la convention lorsque l’examen de sa teneur permet de constater l’erreur affectant le TEG. Le seul critère pertinent, selon elle, constitue dans le caractère apparent ou non de l’erreur à l’examen de l’offre. Or souligne-t-elle, les éléments de calcul du TEG, notamment l’évaluation des frais de garantie dont l’appelant conteste l’assiette, étaient tous présents et connus de l’emprunteur au moment de la signature de la convention. Elle ajoute encore que ces indications étaient chiffrées en valeur absolue, l’emprunteur étant dès lors en mesure de constater l’erreur alléguée sans qu’il soit besoin de calculs complexes ou de connaissances particulières en matière financière.

Il convient de constater que c’est à bon droit, par des motifs propres et adoptés par la cour, que le premier juge a retenu que M. A a attendu six ans pour faire réaliser l’expertise financière alors que l’offre de prêt, et partant l’acte authentique, comprenaient les détails du coût du prêt, notamment le coût de la convention et des garanties, dont l’appelant conteste l’assiette. De ce fait, M. A était, dès le 10 décembre 2007, date à laquelle il a été destinataire du compte détaillé du notaire, en mesure d’apprécier l’exactitude des sommes concernées. Il était également en position de constater que certains coûts, qu’il estime devoir être intégrés au TEG, ne l’avaient pas été. Le premier juge a pertinemment souligné qu’une simple lecture, sans aucun calcul, permettait de constater les frais qui avait été pris en compte ou non. Il en a exactement déduit que le point de départ de la prescription de cinq ans doit être fixé à cette date du 10 décembre 2007. À ceci, il peut être ajouté qu’il apparaît ainsi que la révélation de l’erreur alléguée n’est liée qu’à la seule volonté de l’emprunteur de consulter un expert financier. Or, il était loisible à M. A de faire analyser le TEG dès la formulation de l’offre de prêt, et non six ans plus tard, alors qu’il avait commencé d’exécuter la convention sans la contester en aucune façon.

En aucun cas, les règles déterminant le point de départ du délai de prescription en la matière ne sauraient accorder la faculté au demandeur de faire étudier, à un moment unilatéralement choisi par lui, la validité de l’offre de prêt, ceci plusieurs années après son acceptation.

Il résulte de cette analyse que M. A a connu ou aurait dû connaître l’erreur affectant le TEG dans l’offre de prêt au plus tard le 10 décembre 2007, étant alors en possession de tous les éléments pour en apprécier l’exactitude.

C’est en conséquence à bon droit que le premier juge a décidé que l’action M. A était prescrite lors de son introduction, le 13 juin 2013. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a déclaré irrecevable car prescrite cette demande.

II/ Au fond, sur la demande de déchéance des intérêts :

M. A considère qu’en violation de l’article L. 313-1 du Code de la consommation, qui définit les éléments composant le TEG, certains frais n’ont pas été intégrés dans le calcul du TEG par la société CIC Est. L’appelant expose que la banque n’a, dans son calcul, retenu qu’une somme de 1 530 euros au titre des frais d’acte et de garantie. Or il explique que, ramenés au montant de l’emprunt, les frais d’acte se sont en réalité élevés à 25 680 euros, tandis que les frais d’agence ont été de 13 055 euros. Il estime que ces sommes auraient du être intégrées au calcul du TEG.

S’agissant des frais de notaire, l’appelant argue que le coût des sûretés, lorsqu’il était déterminable antérieurement à la conclusion du contrat de prêt, doit être pris en compte dans le calcul du TEG. L’intimée ne conteste pas ce point, admettant d’ailleurs qu’en cas d’ignorance du coût précis, la banque doit prendre en compte une évaluation.

Pour sa part, M. A avance que l’évaluation retenue par la banque, soit 1 530 euros, était largement sous-évaluée. Il estime au contraire, se prévalant de l’étude réalisée pour son compte par une société Armoria, au terme de plusieurs calculs, que les frais de notaire auraient dû être évalués à 25 680 euros.

En réplique, la société CIC Est répond que son évaluation, qu’elle a réalisée selon une méthode de calcul classique et précise, qu’elle détaille, était cohérente, puisque le décompte final du notaire mentionne une somme de 1 387,94 euros au titre des émoluments, formalités, débours et droits divers relatifs à l’emprunt. Elle en déduit que le TEG exact est en réalité légèrement inférieur à celui mentionné par l’offre de prêt, n’encourant par là aucune sanction.

Il est à rappeler, en premier lieu, ainsi que le souligne l’intimée, que si certains frais notariés, notamment ceux relatifs à l’établissement des sûretés, sont à prendre en compte dans le calcul du TEG, il ne peut dans tous les cas s’agir que des frais relatifs à l’emprunt, qui ne peuvent être confondus avec les frais relatifs à la vente immobilière à proprement parler, lesquels n’ont pas vocation à être intégrés au TEG.

Il convient de relever ensuite que les éléments avancés par M. A pour établir d’existence de frais de notaires s’élevant à 25 680 euros, tant en ce qui concerne son argumentaire que ses pièces, ne démontrent en rien la véracité d’une telle somme. Cette dernière s’avère être le résultat d’un raisonnement déductif procédant par assertions, évoquant des calculs établis par le cabinet d’expertise mandé par l’appelant, sans que soit établi ce que recouvrirait exactement une telle somme. Outre l’absence de documents précis, il n’est pas distingué précisément entre les frais qui seraient spécifiques à l’emprunt et ceux relatifs à la vente immobilière. Or le calcul des divers frais notariés s’appuie sur différents barèmes, certains étant fixes et d’autres proportionnés. Il n’est pas possible, comme le propose l’appelant, de calculer un pourcentage global, qui correspond au pourcentage de financement par emprunt sur l’ensemble de l’opération (74,6 % selon M. A), pour appliquer ce pourcentage à une somme globale de frais notariés ‘ dont, du reste, la teneur exacte n’est pas démontrée. En outre, le montant de 25 680 euros allégué par l’appelant se trouve directement contredit, ainsi que le souligne l’intimée, par le décompte final du notaire qui récapitule précisément tous les frais et ne mentionne que 1 387,94 euros au titre de ceux relatifs à l’emprunt. M. A ne répond pas sur l’analyse de cette pièce.

Il se déduit de cette analyse que M. A ne démontre pas que des coûts notariés supplémentaires auraient dû être intégrés au calcul du TEG, mais qu’au contraire, l’évaluation de la banque ayant été légèrement supérieure au décompte final du notaire, le TEG exact est en réalité légèrement inférieur à celui mentionné par l’offre, n’encourant par là aucune sanction.

S’agissant des frais d’agence, M. A avance qu’une somme versée à titre de commission à un intermédiaire ‘ la société Euroval Patrimoine ‘ doit être intégrée aux frais pris en compte dans le calcul du TEG. La somme versée était de 17 500 euros, ce qui, explique-t-il, rapporté au prêt, donne la somme de 13 055 euros à intégrer au calcul du TEG. Il expose que ces frais d’agence ont rémunéré une prestation de recherche de financement, que la banque a également rétribué l’intermédiaire en intégrant cette rémunération dans le taux nominal d’emprunt, et que la négociation a permis à la banque de ‘placer’ son assurance de groupe.

Pour sa part, la société CIC Est dément avoir eu une quelconque connaissance d’une intervention de l’agent immobilier pour négociation du plan de financement, conteste tout versement de commission et souligne que la seule pièce dont se prévaut l’appelant est un compromis de vente auquel elle n’est pas partie et qui ne lui est pas opposable.

La Cour constate qu’à ce titre également, l’appelant se limite à procéder par allégations sans étayer ses arguments par des éléments objectifs. Il affirme qu’une négociation serait intervenue entre la banque et l’agent immobilier, sans qu’aucune preuve ne vienne corroborer cette présentation. Il n’est pas davantage établi que la banque aurait versé une quelconque commission à l’intermédiaire, dont elle aurait répercuté le coût sur le taux nominal. Si le compromis de vente, auquel n’est pas partie la banque ainsi qu’elle le souligne, précise des frais de négociation de 17 500 euros, ce document ne permet en rien de déduire qu’une partie de cette somme serait relative à une prestation d’intermédiation avec des organismes de crédit. De plus, aux termes de ce document, l’acquéreur avait la charge de présenter la demande de financement à la banque CIAL. Aucune autre démarche n’apparaît avoir été faite auprès d’autres organismes financeurs. Au surplus, le versement de cette commission de 17 500 euros n’est pas même établi.

Il en ressort que l’appelant n’est pas fondé à se prévaloir d’une somme supplémentaire de 13 055 euros, qui aurait dû être intégrée au calcul du TEG.

En conséquence, l’appelant ne démontre aucune erreur de calcul du TEG, aucun des postes de frais qu’il prétend y intégrer n’étant pertinent. M. A sera débouté de sa demande au titre de la déchéance des intérêts en sanction d’un TEG erroné.

II Sur les demandes accessoires :

M. A, succombant, aura la charge des entiers dépens.

L’équité commande l’application de l’article 700 du Code de procédure civile au profit de la société CIC Est, pour la somme de 2 000 euros.

En revanche, l’équité ne commande pas l’application de ces dispositions au profit de M. A.

PARCESMOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement rendu le 25 juin 2018 par le tribunal de grande instance de Strasbourg, sauf en ce qu’il a déclaré prescrite la demande formée par M. A, tendant à voir prononcée la déchéance des intérêts au motif d’un TEG erroné,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DECLARE recevable la demande de déchéance des intérêts au motif d’un TEG erroné formée par M. A,

DEBOUTE M. A de cette demande,

CONDAMNE M. A aux dépens,

CONDAMNE M. A à verser à la société CIC Est, venant aux droits du CREDIT INSDUSTRIEL D’ALSACE ET DE LORRAINE, la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile au profit de M. A.

LA GREFFIÈRE : LA PRÉSIDENTE :

 

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