Peut-on refuser un report ou renvoi d’audience ?

Il est parfaitement possible de refuser un report d’audience mais la décision de renvoi ou de non renvoi revient au tribunal qui peut en toute circonstance accepter le report d’audience même en cas de refus de l’une des parties.

peut-on-refuser-un-report-d-audience-tribunal-judiciaire-de-commerce-avocat

Source image : Hegia Avocat

1- Possibilité de refuser un report d’audience

Peut-on refuser un report d’audience lorsque l’affaire a déjà fait l’objet de renvois successifs antérieurs ?

Contrairement à une idée reçue, il est parfaitement possible de refuser un report d’audience, et ce notamment lorsque l’affaire a déjà été renvoyée à plusieurs reprises.

A contrario, il serait malvenu de refuser le report d’audience dès le premier appel de l’affaire, qu’il s’agisse d’une audience de mise en état devant le tribunal judiciaire, ou d’un premier appel devant le tribunal de commerce.

Quelque soit l’affaire et la juridiction, la décision de report d’audience revient au tribunal saisi de l’affaire, qui peut décider de reporter ou non l’affaire à une date ultérieure qu’il choisira.

peut-on-refuser-un-report-d-audience-tribunal-judiciaire

La décision du tribunal sera effectuée selon une volonté de respecter un équilibre entre :

  • les droits de la défense de celui qui sollicite le report d’audience (par exemple pour avoir le temps de répondre à des conclusions ou de communiquer de nouvelles pièces)
  • la bonne administration de la justice, à savoir le droit d’obtenir une décision de justice dans un délai raisonnable.

C’est la recherche de cet équilibre qui guidera le juge dans sa décision de report d’audience ou de non report.

 

2- Exemple de refus de report d’audience

Voici un exemple de décision de la Cour d’appel de Paris ayant fait droit au refus de report d’audience.

CA Paris, 4, 13, 09-02-2021, n° 16/11101

« SUR CE

Sur le refus de report de l’ordonnance de clôture et de l’audience au fond

Compte tenu des vives protestations du conseil de la société X lequel, par courrier du 26 novembre 2020, a cru devoir stigmatiser la grave atteinte aux droits de la défense que constituerait le refus de report que lui a opposé la cour, il convient à titre liminaire de revenir brièvement sur la décision de retenir l’affaire au fond prise à l’audience du 17 novembre 2020.

Il sera tout d’abord rappelé que la décision de reporter ou non la clôture est une mesure d’administration judiciaire, et que quoi qu’il en soit de la décision des deux magistrats rapporteurs ayant siégé à l’audience du 4 juin 2019, il n’est nul besoin pour prononcer ce report d’un renvoi à la collégialité : les magistrats rapporteurs qui composaient la cour à l’audience du 17 novembre – ce à quoi aucune des deux parties ne s’est opposée – avaient donc tout pouvoir et qualité de prendre à cet égard la décision qu’ils ont jugée opportune.

En l’occurrence, ce refus de report de la clôture s’imposait au vu du calendrier des échanges entre les parties : en effet, la société X a conclu le 17 août 2016, puis le 25 novembre 2016, avant un changement d’avocat qui a motivé de nouvelles conclusions, au demeurant quasi identiques aux précédentes, du 26 novembre 2018, veille de la date prévue pour l’ordonnance de clôture qui a été dès lors reportée. Pour sa part, la société Financière Y, qui avait conclu le 27 septembre 2016, protestait dès cette date contre ce report et concluait à nouveau le 23 avril 2019, soit près d’un mois en amont de la date de l’ordonnance de clôture effectivement prise à la date prévue, soit le 18 mai 2019.

La société Financière Y était ainsi particulièrement fondée à s’opposer, comme elle l’a fait dans ses conclusions de procédure du 3 juin 2019, au nouveau report de clôture sollicité par la société X par les conclusions de procédure du 31 mai 2019 accompagnant ses conclusions au fond, tardives puisque datées du même jour et donc postérieures à la clôture, ce d’autant que ses conclusions datées du 23 avril 2019 ne comportaient ni moyen ni demande nouvelle par rapport à celles précédemment signifiées le 27 septembre 2016, et étaient même, à quelques termes près, rigoureusement identiques à celles-ci. Elles n’appelaient donc aucune réponse, écrite ou, en tout cas, qui ne puisse être formulée dans les délais fixés par le juge de la mise en état, ce que d’ailleurs la lecture des conclusions tardives de la société X confirme : elles aussi sont en effet pratiquement identiques aux écritures précédentes de l’appelante, à l’exception d’une demande de communication de pièces qui, intervenant après quatre années de procédure en première instance et quatre autres devant la cour, dans un litige commercial dont les termes sont figés depuis novembre 2016, ne peut apparaître autrement que dilatoire.

Par ailleurs, s’il est certes regrettable que le conseil de la société X empêché ait été privé de plaider sur ses écritures, l’atteinte aux droits de la défense qu’il déplore n’est pas pour autant constituée, dans une procédure écrite où les quelques soixante-dix pages de ses dernières conclusions ouvrent la cour à une compréhension suffisante de ses demandes et moyens, alors qu’en outre l’équilibre entre les parties a été parfaitement préservé, puisque le conseil de la Société Financière Y, après s’être fermement opposé à un renvoi, a déontologiquement déposé son dossier en s’abstenant de plaider.

La cour observe enfin que tant l’intérêt d’une bonne administration de la justice que le droit des parties à obtenir une décision dans un délai raisonnable commandaient en l’espèce qu’il soit mis un terme à la succession de renvois purement conjoncturels subis par ce dossier sans que celui-ci ait connu, depuis les premiers échanges de conclusions fin 2016, une évolution qui puisse objectivement les justifier.

De l’ensemble de ces éléments découle que le litige opposant les parties sera ci-après examiné par la cour en l’état des demandes et moyens exprimés par les parties dans leurs dernières écritures antérieures à l’ordonnance de clôture maintenue au 21 mai 2019, à savoir celles du 26 novembre 2018 pour la société X, celles du 23 avril 2019 pour la société Financière Y, et celles, uniques, du 12 octobre 2016, pour les sociétés mandataires judiciaires de la société Financière Y. »

 

Revenir en haut